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Nobuko Ishikawa          vert bleuté au rouge bordeaux selon la lumière,
                                                        correspond bien à cette recherche de discrétion.
Avant d’être supplantés par les Chinois, les            Les Japonaises sont, plus que les Occidentales,
        Japonais envahissaient par grappes les bou-     proches de la nature et de la mystique qui s’y
        tiques de luxe des grandes capitales euro-      attache. La poésie et le charme de la joaillerie Van
péennes et faisaient les beaux jours des Maisons de     Cleef & Arpels « Nature Enchantée » explique son
joaillerie. Celles-ci dessinaient pour eux des bijoux   succès au pays du Soleil Levant. Les animaux et
fins et élégants, adaptés à leur frêle silhouette       les fleurs en joaillerie sont très appréciés, telles que
autant qu’à leur culture.                               la chouette (longévité et sagesse) ou la grenouille
                                                        (générosité). La collection de joaillerie Mathon,
La tradition du kimono, parure en soi, a habitué les    comprend quelques-uns de ces petits animaux qui
Japonaises à ne porter aucun bijou, sinon juste une     appartiennent au monde magique du bonheur et
bague. De là vient leur habitude du bijou discret.      de la chance.
Ce sont des clientes éduquées et raffinées, insiste
F. Mathon. En joaillerie, comme dans tous les sec-      Quant à la distribution des bijoux au Japon, elle
teurs du luxe, elles sont avides de connaissance et
s’intéressent au travail des ateliers. Elles observent  est depuis longtemps l’apanage des Department
la finition dans tous ses détails. Elles comprennent
la notion de métiers d’art, elles savent reconnaître    Stores, les grands magasins de luxe. Ils sont une
une belle facture.. Si la marque est importante, elle
n’est pas primordiale, la femme japonaise n’hésitera    vitrine pour la joaillerie, dont les ventes se font
pas à acheter chez un créateur indépendant. La
pureté et la qualité des pierres sont importantes       essentiellement par le système de ventes privées ou
pour elle plus que le nombre de carats.
                                                        d’expositions hors magasin. En effet, il existe une
Les perles sont présentes dans tous les coffrets à
bijoux des Japonaises, en particulier les fameuses      relation de confiance et de conseil entre le vendeur
perles de culture d’Akoya, très prisées dans leur
couleur crème rosée, symboles de goût et d’élégance     et la cliente. Le vendeur connaît très bien sa cliente
parfaite. D’autres pierres sont populaires, précise
F. Mathon, telles que l’Opale, ou encore l’Alexan-      et n’hésite pas à lui proposer des pièces choisies
drite dont la couleur, qui varie en profondeur du
                                                        pour elle, démarche inhabituelle en France, surtout

                                                        de la part des grands magasins. Il y a chez les ven-

                                                        deurs japonais de la curiosité et une grande culture,

                                                        ajoute F. Mathon admiratif. Mais pour installer

                                                        cette relation de confiance, les marques doivent être

                                                        patientes et avoir une stratégie à long terme, cela

                                                        peut durer 20 ans ! ■				  I.H.

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