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Le 13 juin dernier, l’Association Française de Gemmologie (AFG) a tenu la XVème session de ses Rendez-Vous Gemmologiques de Paris sur le thème : Pour une éthique de développement durable des territoires miniers et de leurs populations.

Éthique et responsabilité des territoires miniers
Pour traiter ce vaste et délicat sujet, le président de l’AFG, Didier Giard, a fait appel à des experts et professionnels du monde entier, producteurs, géologues, lapidaires, négociants, membres de la Haute Joaillerie, chercheurs et directeurs de laboratoires, président(e)s des plus hautes institutions et rapporteurs de commissions… C’est donc un panel riche et très cosmopolite qui a pris la parole pour témoigner des projets en cours sur le thème du développement durable dans les mines. La conférence était coprésidée par le président de la CIBJO Gaetano Cavalieri et le vice-président du LFG Gérard Atlan. Si les problèmes liés à l’éthique dans l’industrie du diamant sont assez bien circonscrits, notamment grâce aux actions du RJC, il n’en est pas de même dans le domaine de l’or ou des pierres de couleur. L’extraction est encore souvent artisanale et se prête mal à des contrôles officiels et organisés.

Un enjeu social et humain

Il est bon de rappeler que 10 à 15 % de l’or produit dans le monde emploient 90 % de la main-d’oeuvre dans ce secteur. 1 kg d’or artisanal fait vivre 30 mineurs par an et 100 millions de personnes vivent de l’extraction et du commerce de l’or dans le monde. L’activité minière entretient tout un écosystème humain dans les pays producteurs généralement déshérités. Légiférer sur le commerce de l’or et des pierres comporte donc une véritable responsabilité. Ostraciser certains acteurs reviendrait à ouvrir une porte aux réseaux mafieux et à l’esclavage humain. Parmi les acteurs majeurs de la filière, l’ARM (Alliance for Responsible Mining) apporte une aide aux communautés minières qui n’ont pas accès aux circuits de financement légaux ni à l’expertise nécessaire. Elle fixe également des standards de développement responsable et durable sur toute la chaîne des intervenants. À ce jour, une centaine de mines travaille régulièrement avec l’ARM. Les 10 organisations minières certifiées Fairmined ont vendu en tout 107 kgs d’or en 2015.

Le RJC se penche sur la traçabilité des pierres de couleur
Dans le secteur des pierres de couleur, plusieurs initiatives existent. L’UNICRI (ONU) travaille sur l’introduction d’un instrument de transparence obligatoire des transactions de bout en bout de la chaîne. De son côté, le RJC va mettre en place un projet d’étude. 30 % de la production de pierres de couleur artisanale font vivre 70 % de la main-d’oeuvre employée dans le secteur. Là aussi, nous nous trouvons en face d’un challenge de dimension humaine et sociale lié à un fragile équilibre économique.

Les initiatives des groupes miniers
Dans le domaine social, de l’éducation, de la santé et des infrastructures, Gemfields se pose en modèle et médiatise particulièrement ses initiatives (voir notre article dans le n° de mai-juin 2014). En rachetant la mine d’émeraudes de Kagem en Zambie en 2008, Gemfields a non seulement multiplié la production par 4 et doublé le nombre d’employés, il a aussi acquis la confiance des investisseurs et apporté un mieux-vivre social et humain. En-dehors de Gemfields, des responsables d’exploitation de tailles diverses (Belmont au Brésil, mines d’opales du Wolo en Ethiopie, Bridges au Kenya,…) ont présenté leurs actions portant sur la protection de l’environnement, l’utilisation des ressources locales chaque fois que cela est possible, la formation de coopératives, les avantages accordés aux employés et autres tentatives d’installer un développement réellement durable. À Madagascar, la mine d’Ilakaka connue pour ses superbes saphirs fait vivre jusqu’à 300 0000 personnes. L’enjeu social y est colossal. Mais les jeux de pouvoirs (corruption, mafia,…) et l’absence de maîtrise du gouvernement (marché dominé par les Asiatiques) rendent très compliqués la mise en place d’un développement durable et éthique.

Le désastre écologique

Les préoccupations sont également écologiques. L’extraction sauvage est extrêmement destructrice de l’environnement. Au Sri Lanka, l’extraction artisanale et illégale fait des ravages. Les puits sont destructeurs de la faune, de la flore, du bâti lorsque les galeries sont creusées horizontalement, entraînant l’effondrement des terrains et des infrastructures. L’utilisation de matériaux de forage lourds dans les rivières crée une sédimentation des barrages, entre autres dommages. La sécurité des hommes est aussi préoccupante (forage sans protection et sans étayage).

La position des joailliers
Seule représentante des joailliers de la place Vendôme (M. Charles Chaussepied de Piaget est présent mais en tant que vice-président du RJC), Mme Poulit-Duquesne, PDG de Boucheron (groupe Kering) estime que sur le sujet de l’éthique, les Maisons doivent avancer en ordre groupé et non dispersé. S’il est vrai que Kering occupe largement le devant de la scène médiatique sur le plan de l’éthique dans le luxe, en joaillerie, c’est plutôt Chopard que l’on entend sur le sujet. Le joaillier suisse a lancé des collections en or « fairmined », qu’il utilise aussi pour fabriquer la palme d’or du Festival de Cannes, et le fait savoir. Les projets présentés lors de ces Rendez-Vous Gemmologiques mériteront d’être suivis avec toute notre attention. Il semble évident que la génération Y sera très sensible à cette approche éthique considérée bientôt comme un prérequis dans le secteur du luxe.