Sur un marché en difficulté, la société lyonnaise spécialisée dans la conception 3D en bijouterie-joaillerie affiche une belle résistance et travaille sur de nouveaux projets. Son dirigeant Jean Danielian évoque les perspectives d’avenir avec confiance et lance un appel aux décideurs des grandes maisons.
L’OFFICIEL HORLOGERIE & BIJOUTERIE : Beaucoup de professionnels se plaignent actuellement des difficultés que traverse la profession. Quel est votre avis sur le sujet ?
JEAN DANIELIAN : C’est peu de le dire. La situation est très compliquée. Nous subissons un énorme ralentissement de la production qui met beaucoup de sociétés de sertissage en danger.
L’OHB : Comment expliquez-vous ce ralentissement ?
J. DANIELIAN : Plusieurs facteurs en sont la cause. Un climat économique et social morose, le marché chinois en berne, mais aussi une nouvelle répartition des volumes de production car les marques cherchent à créer leur autonomie. Il faut attendre que les besoins reviennent pour que la sous-traitance soit à nouveau sollicitée.
L’OHB : La raison principale n’est-elle pas la baisse des ventes à l’échelle mondiale ?
J. DANIELIAN : Même si les ventes ont baissé, elles ne sont pas nulles. On est surtout face à des taux de croissance dont les pourcentages sont inférieurs à ceux des dernières années. Dès lors, l’objectif premier consiste à réduire les stocks avant de relancer la machine de production. Certains diraient qu’il y a aussi la flambée du prix de l’or, mais je ne pense pas que cela ait une si grande incidence sur les ventes.
L’OHB : Où en est TGN 409 ?
J. DANIELIAN : TGN va bien heureusement. Nous cherchons même à recruter des personnes qualifiées en CAO et en joaillerie car nos carnets de commandes augmentent régulièrement. Nous avons en parallèle plusieurs projets d’ampleur, ce qui nous pousse à travailler sur différents axes d’amélioration et à les mettre en pratique immédiatement car la souplesse de notre entreprise le permet.
L’OHB : Quels sont vos plans pour le futur ? Comment comptez-vous garder le cap ?
J. DANIELIAN : Le secret est dans la précision des analyses faites sur les dossiers qui nous sont confiés. Nos outils informatiques ont une réelle efficacité dans l’évolution du métier, comme, par exemple, décortiquer toutes les phases de la fabrication, développement CAO, impression 3D ou encore diverses fabrications, mais aussi anticiper les nouveaux marchés.
Tout cela est au service de nos clients qui pourront ensuite décider des meilleures stratégies à adopter.
L’OHB : En quoi TGN 409 se différencie-t-elle de votre autre société, DJ Serti ?
J. DANIELIAN : Le serti se résume à une seule opération, alors qu’un bureau de conception et de fabrication comme TGN, c’est plusieurs métiers en un. Entre la prise de commande et la livraison du bijou fini, il peut y avoir jusqu’à 32 étapes différentes incluant l’administratif, la logistique, les approvisionnements et toutes les phases de la fabrication.
L’OHB : Pourquoi, en 2019, vous êtes-vous lancé dans cette aventure ?
J. DANIELIAN : L’idée de départ était d’explorer d’autres univers n’ayant rien à voir avec la joaillerie. Je ne connaissais pas la 3D, mais c’était un domaine qui m’attirait et dans lequel je voulais exprimer ma créativité. Nous avons commencé par designer des montures de lunettes, des casques de chantier, des outils et des instruments de musique.
J’avais même comme projet un peu fou de créer une balle de tennis cubique que l’on aurait ensuite pu commercialiser via les boutiques de cadeaux. Mais mon antériorité dans le métier a fait que nous avons très rapidement été rattrapés par le bijou. Aujourd’hui, outre le fait que certains auraient du mal à se passer de nous, il est indéniable que TGN est une rampe de lancement pour de nouveaux projets personnels.
L’OHB : Vous avez récemment poussé un coup de gueule sur votre page Linkedin personnelle pour dénoncer un système qui, selon vous, part à la dérive…
J. DANIELIAN : Je sais qu’il est toujours risqué de prendre position et de remettre en cause un système établi. Si le message que je souhaite véhiculer est mal interprété, je n’ai aucun doute sur le fait qu’on me le fera payer.
Mais il en va de notre responsabilité, nous les anciens, de défendre un métier que nous aimons et pour lequel nous nous sommes totalement investis. Je profite de cette tribune qui m’est donnée pour rappeler aux grands décideurs l’importance du dialogue avec la sous-traitance.
L’OHB : Pensez-vous possible de faire évoluer les choses ?
J. DANIELIAN : Honnêtement, non. Mais je suis d’un tempérament positif qui m’interdit de me résigner avant même d’avoir essayé. Il faudrait déjà que tous ceux qui m’envoient des encouragements en messages privés prennent position à mes côtés.
Seul je ne peux rien faire à part me retrouver sur le bûcher. Il faudrait organiser des rencontres en direct avec les grands patrons, en dehors des cadres régis par quelques institutions ou groupements professionnels. Parler vrai, simple, efficace. Exposer les choses sans calcul politique et proposer des solutions.
Nous sommes des chefs d’entreprises responsables et engagés. Nous avons l’expérience du terrain, mais aussi celle de la gestion. Malheureusement, un fossé énorme s’est creusé. Nous devons recréer le lien.
L’OHB : Quelle est votre conclusion ?
J. DANIELIAN : Les plus grands empires économiques se sont toujours appuyés sur des compétences diverses fédérées autour d’un projet. Aujourd’hui nous cherchons le projet. La démotivation est fortement ressentie partout. Il faut donc que ma requête attire l’attention des grands dirigeants. Il n’est pas trop tard pour rester les meilleurs, mais ce sera forcément tous ensemble.
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