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L’or 9 carats continue à progresser fortement dans les ventes de la bijouterie française mais n’a toujours pas trouvé le bon positionnement d’image, faute d’un marketing adequat. Ce marketing « hasardeux » ne masque-t-il pas une sorte de « malaise culturel inconscient » au pays du « luxe à la française » où l’or 750°/°°° était solidement implanté ? Mais attention, les bijoux 9k en boutique devront faire face à la forte concurrence de l’internet quand le client aura compris qu’il peut trouver encore moins cher sur le web.

Dans nos numéros de janvier, de mars et de mai 2013, nous avions publié plusieurs dossiers sur l’or 9 carats, donnant successivement la parole aux pros et aux contras. Nos articles ont fait ressortir à la fois les opportunités du marché, essentiellement une nouvelle offre moins chère, mais également les craintes et les risques liés à ce nouveau venu, perte de chiffre d’affaires sur l’or 750°/°°°, une certaine « ignorance » du client sur ce qu’il achète, des problèmes de qualité et de SAV,… Un an après, nous recevons de nombreux courriels de clients comme de détaillants qui se plaignent de cet or qui blanchit ou s’avère fragile. Qu’en est-il réellement ?

Nous avons choisi de relancer le débat, suite à l’analyse de mots clé générés par nos articles sur l’or 9 carats. En effet, nous avons constaté une très forte hausse des clics sur nos articles à propos de cet or, plus de 1000 en janvier 2014, et la tendance se poursuit en février. Il s’agit bien de « particuliers » qui cherchent à comprendre le 9 carats, car ils ne trouvent pas la réponse claire en boutique. Certains nous répondent qu’il ne faut pas généraliser les quelques cas avérés de clients insatisfaits, mais nous affirmons le contraire : « Nos analyses indiquent un vrai problème de marketing sur le terrain ».

Une forte croissance avérée

Ecostat, le département économique et statistique du comité Francéclat, publie chaque année les résultats du secteur de l’horlogerie et de la bijouterie en France. Le bilan 2013 met en avant une croissance sans précédent des ventes de bijoux en or 375°/°°°. Si l’ensemble de la profession est en berne avec -4 % en valeur par rapport à 2012, l’or 18 carats ayant chuté de 15 %, l’or 9 carats a bondi de 27 %. En 2011, les ventes de bijoux en or 9 carats représentait 169 M €, en 2013 540 M €.

En unités, leur croissance est également exponentielle : 5 247 M de pièces contre 4 100 M pour l’or 18 carats. Si ces ventes ne représentent que 0,5 % des bijoux de plus de 1 000 € et 16 % de ceux qui coûtent entre 300 et 999 €, elles ont conquis 58 % de la PDM des bijoux de moins de 300 €. L’effet de la baisse du cours de l’or, qui a perdu presque 20 % de sa valeur en 2013, ne se fait pas encore sentir sur les prix. Mais l’explication n’est peut-être pas là. Les bijoux en or 9 carats semblent avoir vraiment trouvé leur « niche » avec une nouvelle offre. Il y a donc fort à parier que, quelle que soit la baisse du prix en vitrine des bijoux en or 18 carats, le 9 carats s’est imposé de façon durable.

Une communication insuffisante

Il n’en reste pas moins que les clients sont dans la confusion. Comment s’informer sur ce nouvel or, entre les mails furieux des clients qui avouent avoir été « piégés » et les responsables d’enseignes indignés de ce faux procès ? Y a-t-il de « mauvais » alliages ? Y a-t-il de « mauvais » fournisseurs ? Impossible de le savoir. Interrogé par l’OHB, Claude Schlappi, le président de Gay Frères, regrette cette opacité et refuse de suivre le mouvement. A son avis, les bijoutiers se sont engouffrés un peu trop vite dans la brèche du 9 carats « qui n’a plus rien de précieux.

Sortir par le bas n’est pas la solution ». Le consommateur est peu informé, il achète un bijou sur lequel il a le coup de coeur. « Le terme 375°/°°° lui parle-t-il vraiment ? Pas sûr » dit Claude Schlappi, persuadé que, de la même façon, le sigle RJC leur est totalement étranger, alors qu’il recouvre des contraintes considérables pour le joaillier adhérent. Le PDG de Gay Frères veut croire que le 9 carats est un phénomène de mode qui ne résistera pas au temps une fois que les prix de l’or se seront réajustés à la baisse en vitrine. Car les problèmes de vieillissement rapide du bijou se posent toujours, le bijou en or 375°/°°° est plus fragile, plus cassant à cause de ses alliages. « Regardez, même le manège à bijoux est resté sur le 18 carats ! » souligne-t-il, mais il ajoute que c’est une question de conviction personnelle. Il comprend le choix des bijoutiers qui sont à la peine, et des clients dont le pouvoir d’achat est de plus en plus amputé.

« C’est de l’or, plus léger, moins cher » : à quand un vrai marketing ?

 Soyons francs : les fabricants de 9 carats surfent sur une bonne aubaine, Bruxelles a accepté d’appeler « or » un alliage comprenant 37,5 % d’or. Une aberration ! Sauf à voir les fédérations et syndicats de bijoutiers s’unir dans un lobbying puissant pour monter au créneau à Bruxelles, il ne se passera rien. On peut le comprendre, leurs adhérents bijoutiers y trouvent un relais de croissance. Or le 375°/°°° est un nouveau métal, il a besoin d’un positionnement clair et transparent sur le marché. On entend trop souvent les vendeurs dire « C’est de l’or, plus léger, moins cher ». Certains poussent même les clients à comparer les deux mêmes modèles pour en constater l’aspect similaire. L’argumentation s’arrête là. Le client est rarement prévenu que l’or risque de blanchir. Sa déception est à la hauteur de l’investissement sentimental qu’il n’a pas manqué de faire dans son bijou.

Un reportage de France Info* illustre malheureusement ce qu’il ne faut pas faire. La scène se passe dans la boutique d’une enseigne connue, où les clients vantent l’aspect neuf identique de deux alliances, l’une en or 750°/°°°, l’autre en 375°/°°°, expliquant qu’ils vont évidemment choisir la moins chère. Fin de l’échange. Pourquoi cet amalgame ? On ne vend pas de l’argent comme de l’or blanc, ni de l’or blanc comme du platine. Ce sont pourtant bien les grandes enseignes qui devraient donner l’exemple, tant elles sont observées et suivies par la profession comme par les clients, et proposer une nouvelle façon d’aborder le 9 carats. Dans ses dernières collections d’inspiration orientale, russe, Art déco, Maty était sans doute sur la voie de ce qui conviendrait aux bijoux 9 carats, un côté plaisir, ludique, rêveur, un petit luxe de mode. Une carte à jouer immense pour la jeune clientèle.

Le cristal et le verre sont-ils des matériaux précieux ? A priori non, et pourtant Pandora et Swarovski ont formidablement réussi leur marketing en se hissant dans le créneau haut de gamme qui pourrait même amener le dernier, en toute légitimité, vers la joaillerie. Sans avoir jamais « confondu » cristal et cristal de roche. Il est urgent de trouver un vrai positionnement pour le 9 carats. Il mérite sans doute mieux que sa place à l’ombre du 18 carats.

*www.francetvinfo.fr/economie/video-des-bijoux-en-or-a-bas-prix-le-9-carats-est-devenu-un-marche-incontournable_522305.html